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Daniel Appell, guide naturaliste, accompagnateur en montagne

Les fleurs de montagne

Les plantes de montagne, on a vite fait de jeter un coup d’œil et de continuer son chemin ! Et pourtant, comme le dit Francis Hallé : « Les plantes sont nos meilleurs alliés devant les graves problèmes écologiques que rencontre notre planète.»
Alors, prenons le temps de les découvrir…
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Rusée l’orchidée !
Ayla
Il y a 35 000 ans, quand Ayla vit son monde s’écrouler autour d’elle, comment aurait-elle pu se douter qu’elle deviendrait une grande « guérisseuse » ?
La connaissance des plantes qui peuplaient son univers allait non seulement lui donner un statut social de première importance, mais aussi lui sauver la vie ainsi que celle de ses proches.
L’héroïne de la magnifique saga de Jean M. Auel, Les enfants de la Terre, est fascinante à bien des égards. Et l’importance primordiale que nos lointains ancêtres donnait à la connaissance des plantes ressort dans ce récit de façon singulière.
Car si la chasse faisait partie bien sûr des sources de nourritures, elle ne représentait pas, loin s’en faut, la place que l’on veut lui attribuer aujourd’hui… On ne tue pas un mammouth tous les jours avec des lances !
Ne serait-ce que parce que cela représentait un gâchis monumental au regard du nombre de bouches à nourrir. Et nos ancêtres, bien conscient qu’ils étaient entièrement dépendant de leur environnement, le respectaient totalement, jusqu’à le déifier.
« Avec quoi soigne-t-on les brûlures, Ayla ?
Euh… avec une quantité égale de fleurs d’hysope, de verge d’or et de rudbeckie séchées et réduite en poudre. Puis on les humecte pour en faire un cataplasme que l’on recouvre d’un bandage… Les fleurs et les feuilles de menthe… Les racines de lis des marais… »
La cueillette des baies sauvages, les arbres avec leurs cortèges de fruits, noix, graines et toute les variétés de la flore, représentaient largement le quotidien de leur nourriture.
La connaissance des plantes était donc vitale pour nos ancêtres.
Pour se nourrir, pour se soigner, pour entrer en contact avec les ancêtres…

Bien commun
Ces savoirs ancestraux et cette biodiversité foisonnante sont exceptionnels. Ils ont nourri l’humanité depuis ses origines. Cela mérite pour le moins notre respect. Par ailleurs, leur connaissance et leur compréhension suscite l’émerveillement.
Les groupes pharmaceutiques d’aujourd’hui auraient sans doute payé très cher Ayla pour lui soutirer tous ses savoirs…
Mais ne font-ils pas partie du bien commun de l’humanité, au même titre que l’eau et l’air ? Utiliser ces savoirs pour s’approprier les vertus d’un végétal sous prétexte que l’on a modifié quelques uns de ses gènes, ce qui en fait des ogm, est indigne !
Ayla, et avec elle tous les peuples contemporains soit-disants arriérés, nous donnent une leçon magistrale d’écologie.

La flore alpine
Sans oublier que le règne végétal plonge ses racines jusqu’aux origines de la vie sur Terre, aujourd’hui, l’ensemble de la flore alpine que l’on peut observer résulte tout d’abord des bouleversements provoqués par la formation des Alpes. Cela remonte au début du tertiaire, soit environ 38 millions d’années.
Mais aussi des modifications climatiques qui ont accompagnées cette longue période géologique. En particulier, les épisodes glaciaires du dernier million d’années, avec leurs cortèges de glaciers.
Le relief et le climat se sont tellement modifiés que l’histoire des plantes raconte notre propre histoire : comme l’homme, elles ont évoluées et se sont adaptées à tous ces changement majeurs.

Le dernier épisode glaciaire s’étant achevé il y a environ 15 000 ans, débouchant progressivement sur les climats que nous connaissons aujourd’hui. Les espèces adaptées au froid migrèrent lentement en altitude laissant la place à d’autres, mieux adaptées au nouveau couvert végétal qui s’est installé.

Les modifications de tailles, la colonisation de nouveaux biotopes, l’apparition de nouvelles espèces, la présence de relictes glaciaires, végétations dont la présence dans un biotope ne s’explique que par des conditions climatiques anciennes disparues, sont autant d’indices sur l’histoire de la flore alpine. Les plantes nous révèlent également de nombreux secrets sur notre environnement quotidien. À commencer par les sols. Ne pousse par n’importe qui où bon lui semble ! Sols granitiques ou calcaires, molasses, tourbes acides, riche couche d’humus d’un sous bois, prés de fauches, alpages…

Les paléontologues nous apprennent ainsi que la Prêle des marais actuelle que l’on trouve dans les prairies humides, haute de quelques dizaines de centimètres, sont des naines à côté des leurs lointaines ancêtre du carbonifère, il y a 300 millions d’années, qui atteignaient 45 mètres de haut.

Le Neprun nain lui, rampe et s’accroche à la surface du sol caillouteux, à la recherche de la chaleur absorbée par les cailloux. Il est ainsi moins exposé aux vents et l’hiver, le manteau neigeux le protégera des froidures extrêmes. Sa croissance étant très lente, sans le savoir, on se retrouve à piétiner un arbrisseau centenaire. Le nanisme est une forme d’adaptation à l’apparition des rudes conditions montagnardes.

On compte environ 25 espèces de saules dans les Alpes. Le Saule nain ou herbacé, s’étale lui aussi dans les combes à neige gorgée d’eau de fonte. Il s’agit de l’arbre le plus petit du monde. Son minuscule tronc s’étale juste au-dessus du sol. Très pratique pour une bonne sieste au sommets des arbres : il suffit de s’allonger par terre ! La famille des Saules (Salix) était bien connue d’Ayla. Toutes ces espèces contiennent de la salicine. Un petite fièvre ? Des douleurs ? Une petite infusion à base d’écorce de saule et basta ! L’aspirine contient des substances de synthèse tout à fait analogues…

La Globulaire à feuille en cœur signe un sol calcaire. Une décoction de ses feuilles est très bénéfique contre les constipations.

Le Thym, le Romarin, l’Hysope… Inutile de les chercher sur les pelouses alpines. Des plantes qui aiment les montagnes de soleil. L’Hysope qui a les honneurs de la Bible, est une plante médicinale connue depuis des millénaires. Elle est remarquablement efficace contre les affections bronchiques. Mais attention, son huile essentielle est toxique.

Et la toujours blanche, l’étoile des glaciers ou encore l’edelweiss. Fleur emblématique de la montagne, elle est tellement bien adaptée aux milieux froids que vous ne la trouverez que sur les crêtes ventées, les falaises orientées au nord, les endroits impossibles à vivre !
Normal vu ce que les hommes lui ont fait : la légende raconte qu’après avoir guidé les Rois mages auprès du divin enfant, l’étoile du Berger s’inquiéta du trouble que sa réapparition au firmament aurait pu provoquer. Un nouveau messie ? Impossible. Elle erra alors longtemps en quête d’un refuge. Les Alpes, vêtues de neiges éternelles et de glaciers étincelants, lui apparurent comme un écrin parfait. Eclatant en une multitude d’étoiles filantes, elle saupoudra alors les cimes d’étoiles mythiques…

« Anthropie »
Les plantes racontent notre histoire, notre géographie, nos maladies, nos croyances, les évolutions du climat de la Terre. Mais aussi l’emprise de plus en plus délirante de l’espèce humaine sur la nature.
Heureusement, de nombreuses montagnes bénéficient de mesures de protections. À commencer par les Parcs Nationaux et Régionaux.
Mais depuis bientôt 5000 ans, les cultures, l’élevage, les aménagements incessants se font au détriment de la végétation naturelle. Le défrichement des forêts de montagne, pour gagner des pâtures et utiliser le bois, constitue peut-être notre impact le plus marquant depuis le Moyen-Age.
Plus récemment, les menaces dûes aux activités humaines s’amplifient. L’introduction de nouvelles espèces qui perturbent les équilibres écologiques. L’érosion de la biodiversité. L’apparition de maladies qui se propagent rapidement dans les forêts plantées mono-espèce (bostryche de l’épicéa, tordeuse du mélèze).
Les aménagements touristiques nombreux et lourds pour l’industrie du ski et leurs hideuses saignées. L’usage d’engrais et de pesticides en tous genres dans les pratiques agricoles. À tel point que l’on en vient à se méfier avant de boire l’eau des torrents de montagne…
Pour ceux qui douteraient encore des modifications climatiques en cours, une petite visite chez les végétaux et les insectes, qui leurs sont étroitement liés, lèvera tous les doutes.
À l’échelle géologique, c’est tout nouveau. Quelle efficacité…

Découvrir les fleurs de montagne
Mais les randonnées en montagne, au printemps ou au début de l’été, restent toujours un émerveillement de couleurs et de variétés florales. Même sans connaître son nom, son histoire, regardez de près l’une d’elle. Puis une autre. Elles sont belles et tellement différentes.
En attirant les insectes à coups de couleurs chatoyantes et de nectars succulents elles participent d’une biodiversité qu’il faut préserver.
De nombreux petits livres, pas trop lourds, peuvent se glisser dans le sac. Ils vous en raconteront plus.
Il y a aussi des applies très bien faites pour les accros du smartphone.
Mais une simple petite loupe ou des photos macros vous feront découvrir un monde magnifique.
Non, la botanique n’est pas rasoir.
Elle raconte notre histoire et celle de la nature. Excusez du peu !

Les fleurs de montagne

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