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Daniel Appell, guide naturaliste, accompagnateur en montagne

Le loup

Il déchaîne les passions. Humaines. Car le loup est une affaire culturelle. Essentiellement. Miroir de nos peurs et de nos phantasmes…

En France il est grand et méchant par essence. En Italie, une louve donne symboliquement naissance à Rome…
Le loup est l’image même de la Nature sauvage, libre et indomptée, qui insupporte à tant d’humains…

Adaptation maximum
Les loups montrent de très grandes qualités adaptatives aux conditions climatiques, des plus extrêmes aux plus tempérées. Plaines et montagnes, steppes et forêts peuvent constituer un biotope d’accueil. Avant sa confrontation avec l’homme, les loups étaient présents dans tout l’hémisphère nord. Seule la forêt tropicale humide les arrêtent. Les autres continents abritent d’autres espèces de canidés ou de prédateurs, mais pas de loups. Ainsi, les loups sont capables de s’implanter dans presque tous les écosystèmes terrestres et de s’y développer. Ils s’adaptent à un biotope sans en être dépendant.

Entre chiens et loups
Le chien est peut-être un loup domestiqué mais cela reste sans preuves déterminantes, à ce jour. Leurs patrimoines génétiques sont cependant semblables à 1% près. Leurs accouplements sont fertiles et les individus qui en résultent sont aussi féconds. Mais le chien retournant à l’état sauvage ne recompose jamais la structure sociale des loups et ne se rapproche pas de sa morphologie. Et s’il chasse aux côtés de l’homme, gare à lui, car une meute n’en ferait qu’une bouchée !
La domestication des loups s’est, peut-être, réalisée à partir de la capture d’une portée de louveteaux par une société de chasseurs-cueilleurs, puis, par une sélection progressive sur la base de la tolérance à l’homme. Le temps faisant le reste.

Leu leu…
La piste du loup est alignée, le loup couvrant ses empreintes à contrario du chien, qui marche de travers. Mais celles du renard peuvent aussi être relativement alignées ! Seule l’analyse génétique d’un matériel biologique recueilli sur le terrain peut lever l’incertitude.
En groupe, les loups progressent souvent en file indienne. Une piste peut peut ainsi d’un coup se dissocier en deux, trois… Signant la présence d’une meute alors que l’on croyait suivre un individu unique…D’où l’expression « à la queue leu leu », leu voulant dire loup en ancien français.

Dispersion
La dispersion, c.a.d. le départ des jeunes adultes d’une meute, commence en avril/mai et se poursuit jusqu’au début de l’automne. Le plus souvent seuls, ces jeunes loups parcourent des distances de quelques dizaines, voir centaines, de kilomètres. Mais le plus long parcours connu affiche 886 kms au compteur !
Les raisons pour lesquelles un loup va finalement s’installer dans un biotope donné sont floues. Des terrains de chasses propices et riches en proies, la localisation d’un partenaire du sexe opposé ? La première portée d’un couple de loups fondateurs marquera l’installation de la nouvelle meute.

Meutes
Une meute est constituée par un groupe d’individus composé des parents et de leurs descendants. Sur parfois plusieurs générations.
Pour les loups, espèce éminemment sociale, les relations entre les individus du groupe sont essentielles à leur vie quotidienne.
La perception humaine de cette hiérarchie a évoluée historiquement et semble très représentative de la façon dont les hommes pensent la bête.
Le mythe du mâle dominant sur une hiérarchie pyramidale est toujours très présent. Cette représentation consacrait le despote puissant, protecteur et magnanime. Toutes les relations de la meute étant analysées selon cette hiérarchie stricte : accès à la nourriture, reproduction, élevage des jeunes…
Mais cette perception est dépassée : les observations éthologiques récentes ne l’ont jamais confirmée !
La notion de rôle est aujourd’hui utilisée pour décrire le fonctionnement social d’une meute. L’initiative pour le marquage du territoire, le départ pour la chasse, etc, peut revenir a un loup ou une louve, non dominant. La relation dominance/soumission n’est plus un statut détenu par un loup dans toutes les phases sociales du groupe mais plutôt une posture corporelle régissant les rapports entre deux individus de la meute. La répétition entre deux loups de ces postures déterminant les rôles de dominant et de soumis au sein du groupe.

Contes, légendes, fables et autres mythes…
Voilà un domaine très richement documenté ! Et très intéressant car il constitue souvent les racines des situations actuelles. En voici deux exemples.
– Romulus et Remus :
La fondation de Rome repose sur la légende de ces deux enfants sauvés d’une mort certaine par une louve qui les allaita. L’exégète y voit pour sa part une confusion linguistique entre l’espèce zoologique et un terme argotique italien pour désigner une prostituée, lupa. Il s’agit cependant d’une des figures mythiques les plus positive du loup ! Peut être est-ce là une des raisons de la tolérance des italiens envers les loups ?
– Dracula :
Loups et vampires appartiennent à la même constellation symbolique. Lune, métamorphose, force surhumaine, sauvagerie, soif de sang, sexualité, autant de connotations très puissantes. L’humain ne pouvant faire face directement au vampire, le loup, par sa symbolique sauvage, constitue une étape idéale vers l’épouvante et le surnaturel.

La place que les sociétés humaines accordent aux loups symbolise à merveille leurs rapports réels à la Nature…

Sources (sélection) : Les loups, Geneviève Carbone, Edts Larousse 2004 – Le loup, Jean-Marc Landry, Les sentiers du naturaliste, Édts Delachaux et niestlé, 2004.

Le loup

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