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Daniel Appell, guide naturaliste, accompagnateur en montagne

L’écureuil

Roux ou gris, l’écureuil est un petit animal facilement observable. Sympa, sautillant, curieux… Mais l’étude de sa répartition géographique réserve des surprises !

L’écureuil signe sa présence par des indices de vie tels que des cônes d’épicéas grignotés, des écailles de cônes en abondance sous un grand arbre, ses empreintes de pas dans la neige, qui sautillent d’un arbre à l’autre…

Roux ou gris, l’écureuil est un bon exemple des des subtiles équilibres écologiques.

En France, seul l’écureuil roux est présent alors qu’en Grand Bretagne l’écureuil gris, introduit à la fin du XIX ème s’y est très bien implanté. À tel point que l’écureuil roux est désormais menacé de disparition. Présent sur tout le territoire Il y a une cinquantaine d’années, aujourd’hui, il se cantonne principalement en Écosse. L’écureuil gris ayant pris sa place ailleurs. Cette évolution est intéressante car elle montre à quel point les équilibres et facteurs écologiques sont imbriqués.

Côté gabarit, l’écureuil gris, contrairement à une idée commune, n’a pas évincé le roux parce qu’il est plus gros et plus combatif dans sa quête de la nourriture. Des études révèlent qu’en de nombreux cas l’écureuil roux peut dominer le gris.

Côté climat, la rudesse de l’hiver ne semble pas en cause car l’écureuil roux vit très bien en Scandinavie et en Europe de l’est, où les hivers sont froids. Mais ils y sont aussi plus secs et il est possible qu’un temps doux et humide le rende plus fragile devant la maladie. Ce critère de santé contribue sans doute à la réduction de sa population mais il a préexisté à l’introduction de l’écureuil gris.

Le régime alimentaire est par contre un critère qui semble décisif.
Il semble que l’écureuil roux trouve sa niche écologique dans les forêts de conifères où il se nourrit essentiellement des graines des cônes de pins qu’il va chercher au sommet des arbres. Rarement abondante, cette nourriture devient un facteur limitant de la population présente sur un territoire donné : on compte moins d’un écureuil roux par hectare.
À contrario, l’écureuil gris gris semble mieux adapté aux forêts à feuilles caduques. Ses sources de nourriture sont plus variées, donc plus abondantes. Une population plus importante peut vivre sur un territoire donné. Elle peut représenter le double de celle de l’écureuil roux et jusqu’à six fois plus !
Mécaniquement, quelle que soit la quantité de nourriture disponible commune aux deux espèces, l’écureuil gris en consomme les deux tiers.
D’où une limitation supplémentaire pour l’écureuil roux. Celui ci devra se rabatte sur une nourriture moins nutritive comme les champignons. C’est le cas des noisettes. Idem pour les glands. De plus l’écureuil roux n’en est pas très friand car il les digèrent moins bien. Les gris en sont friands et en profitent pour s’engraisser avant l’hiver ! Ce qui leur donne un gros avantage dans la plus grande partie de la Grande-Bretagne.

L’impact des activités humaines est notable.
L’écureuil roux n’a pas profité des plantations extensives humaines de conifères. Les espèces plantées afin d’obtenir du bois, le sont dans des conditions qui ne permettent pas un développement harmonieux des arbres et donc la production abondante de cônes. L’alignement et densité élevée de ces arbres qui poussent sur des sols pauvres font que les cônes sont rares et leurs graines sont de mauvaises qualité. Enfin, leur exploitation au bout de 30 ans fait qu’ils ne produisent des cônes que pendant quelques années.
L’écureuil gris est lui aussi désavantagé par ce type de monoculture. Mais l’homme, a entrepris également de planter des chênes et des hêtres pour palier aux désagréments de cette monoculture. Arrivés à maturité, ceux-ci fournissent une alimentation supplémentaire à l’écureuil gris qui du coup s’implante dans un biotope qui lui est au départ défavorable !
Autre facteur aggravant, en Grande-Bretagne, certaines années la production de faines et de glands est très faible. Là encore, l’écureuil gris, habitué à d’autres biotopes et à une alimentation plus variée, s’en accommodée assez bien.

La richesse de l’alimentation a une conséquence directe sur la reproduction.
L’alimentation automnale est très importante car elle conditionne la santé et la grosseur des femelles au début de l’hiver et, implicitement, la reproduction du printemps suivant.
Les femelles les plus grasses seront le plus à même d’allaiter leurs petits. Un début d’hiver sous alimenté met en péril la portée annuelle. De plus, l’écureuil roux a, le plus souvent, une portée annuelle unique alors que le gris en a deux. Le développement des populations respectives s’en ressent fortement.

L’écurreuil gris consacrant jusqu’à 80% de son temps à la recherche de nourriture au sol, il y trouve toutes sorte de nourriture que l’écureuil roux, plus arboricole ne pourra se procurer, ne passant lui qu’un quart de son temps au sol. L’écureuil gris dispose de réserves que le roux ne peut emmagasiner sous peine d’être moins performant dans sa recherche de nourriture dans les arbres, sur les fins rameaux portants les fruits. Voilà encore un désavantage pour lui lorsque le mauvais temps persiste !

L’homme, en fragmentant les forêts, en construisant des routes et des chemins, a isolé de petites zones au milieu de terres arables pouvant accueillir l’écureuil roux. Celui-ci a besoin d’une forêt continue pour pouvoir se déplacer en sécurité, car descendre d’un arbre représente pour lui un grand danger et une dépense d’énergie supplémentaire. L’écureuil gris, lui, s’est là aussi mieux accommodé de ce morcellement, capable de circuler à découvert sur de plus grandes distances.

Ainsi, bien que les biotopes de Grande-Bretagne ne constituaient pas l’idéal pour l’écureuil roux, il s’y est adapté et les a colonisés. Mais confronté à un rival mieux armé pour ces biotopes, un déséquilibre écologique s’est créé. Les deux espèces cohabitent ainsi pendant un temps mais une fois qu’un désiquilibre apparaît, l’écureuil roux commence à décliner et est incapable de remonter la pente. Il cède alors la place à l’écureuil gris en une quinzaine d’années.

L’écureuil

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